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Les "cartons rouges" au tourisme



 
  MEXIQUE: La "belle et écologique" station de luxe...
 

La "belle et écologique" station de luxe de Huatulco

La belle et écologique Huatulco est l'exemple même d'un échec coûteux pour ne s'être jamais préoccupé du contexte et des difficultés sociales .

La belle et écologique station de luxe de Huatulco est née en 1984 sous les auspices de FONATUR, l'agence fédérale chargée de développer le tourisme et concepteur en plus de Huatulco, de Cancun et d'autres merveilles. Retraitement des eaux, normes strictes en architecture, Huatulco se présentait comme la nouvelle station modèle du tourisme dont l'unique objectif était " le développement économique et social de la zone ".
Avec cette noble vue en tête, on justifiait les 22 000 hectares expropriés aux communautés qui y vivaient, les quelques groupes paramilitaires utilisés pour déloger les plus récalcitrants, et 500 millions de dollars d'argent public selon les chiffres officiels (650 millions selon l'élu au tourisme de la ville) pour construire " les aménagements nécessaires au développement ".

La dénaturation totale du lieu en " station de 36 plages " ne serait-ce que par l'utilisation des " quatre voies " rend difficile la dénomination " écologique ".

   Routes, golfe, marinas, port, " hôpital, écoles, eau, électricité " va présenter très justement le directeur régional de Fonatur, Ramon Sinobas. Pour Fonatur, Huatulco est évidemment un progrès social , " puisque avant il n'y avait rien et maintenant, ils ont tous les services " ajoute Ramon Sinobas.

 

Avant, il n'y a avait pas rien puisque des pêcheurs y vivaient depuis toujours mais certes le bleu transparent du Pacifique n'avait pas, comme le mirage Huatulco allait le faire, attiré 30 000 habitants, la majorité travaillant dans le bâtiment. La reconversion dans l'hôtellerie de luxe n'a jamais fonctionnée et l'Etat continue de donner deux millions de dollars chaque année pour l'entretien de la station, des pelouses et des bites d'amarrage.

2500 chambres, 30 000 touristes

Huatulco devait être une station de luxe avec un minimum de 5000 chambres. Vint ans après, on atteint difficilement 2500 chambres, qui sont loin d'appartenir toutes à la catégorie supérieure de l'hôtellerie. Les quatre voies de Huatulco sont désertes toute l'année , excepté en décembre et deux semaines à Pâques, lors des traditionnelles vacances mexicaines. Pendant la semaine sainte, ce sont 30 000 touristes qui débarquent, la plupart appartenant à la classe moyenne et qui vont loger " chez l'habitant ". Pour les locaux, la semana santa est synonyme de déménagement. " Le moment où l'on peut faire un peu d'argent " dit-on : on laisse la maison à une famille de Mexico et on dort dans la campagne, en famille.

La station n'en devient pas très bien organisée, évidemment. " 2500 chambres, 30 000 touristes, on est bien obligé de reconnaître que les touristes dorment chez les habitants " explique le service touristique de la ville. Serveur, femme de chambre, même dans l'hôtellerie de luxe, tous gagnent le salaire minimum (50 pesos soit 4 euros par jour) mais la vie est bien plus chère qu'ailleurs, les loyers en particulier. Du coup, la majorité des gens peuvent disposer de l'électricité ou de l'eau sauf que beaucoup n'ont pas de maison et squattent avec trois planches et deux tôles un bout de terrain loin des plages de Huatulco…

Pour ses vingt ans, Huatulco n'a évidemment pas atteint son objectif de développement social et économique. Sans aucune concertation locale, la station s'est imposée. Il n'y a pas de preuves bien sûr, mais ceux qui ont refusé de donner leurs terres au " progrès " sont morts, assassinés. Par qui ?
L'argent public a été donné en premier aux aménagements pour l'industrie touristique (aéroport, routes, digues, golf, aménagements nautiques) mais aucune contrepartie en matière de législation sociale n'a été imposée aux entreprises . Nous sommes en pays de maquiladoras, ces usines d'assemblage répandues dans tout le pays qui ne respectent aucune législation minimale... Du coup, le luxe disparaît vite quand on va se balader à quelques kilomètres de la plage.
La misère a un goût encore plus choquant face aux pantalons à carreaux qui peuplent le golf. La belle et écologique Huatulco est l'exemple même d'un échec coûteux pour ne s'être jamais préoccupée du contexte et des difficultés sociales.

Le Cipo-Rfm peut vous montrer l'autre versant de Huatulco. Les trois familles qui tentent de survivre sur le même bout de terrain squatté, demandent depuis des années un terrain pour vivre.

Pour connaître Huatulco avant le ciment, nous vous conseillons d'aller à San Augustin … à quelques kilomètres de là. Ici, Fonatur a exproprié espérant développer jusque là, mais Huatulco est bien loin. Pourtant l'expropriation est toujours une menace… Le projet de San Augustin est passé sous silence par les autorités. Sur les terres de la station Huatulco, le tourisme communautaire n'est pas le bienvenu .